OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Pourquoi ProPublica se met à la publicité ? http://owni.fr/2011/01/06/pourquoi-propublica-se-met-il-a-la-publicite/ http://owni.fr/2011/01/06/pourquoi-propublica-se-met-il-a-la-publicite/#comments Thu, 06 Jan 2011 16:43:21 +0000 Megan Garber http://owni.fr/?p=41315 Allez jeter un œil au site de ProPublica, et vous noterez peut être qu’à coté des articles de blog, des boutons de dons, des projets spéciaux, et de tout ce qui fait la réputation de ce site de journalisme d’investigation, est apparu une nouvelle fonctionnalité : des bannières publicitaires. A partir d’aujourd’hui, le site internet va afficher des publicités afin de compléter les dons des différentes fondations partenaires ainsi que des lecteurs : ses deux principales sources de revenu.

“Nous avons attendu longtemps avant de le faire, ce n’était qu’une question de temps” m’a expliqué Richard Tofel au téléphone.

ProPublica n’est pas le seul à s’aventurer dans le domaine de la publicité caritative. Un certain nombre de site semblables dont California Watch, Texas Tribune, Voice of San Diego, et MinnPost affichent des messages sponsorisés de manière directe via des partenariats communautaires ou des souscriptions d’entreprises. Comme l’a expliqué Tofel dans un billet de blog expliquant et annonçant la démarche : “Nous le faisons dans l’objectif habituel : générer des recettes permettant d’alimenter nos activités, promouvoir ce que les personnes dans le milieu appellent la “durabilité”.”

Les revenus ainsi perçus ne seront certainement pas supérieurs à ce que rapportent les autres canaux de financement de ProPublica. Le site avait 1300 donateurs en 2010, en plus des 3,8 millions de dollars  accordés par la Fondation Sandler. Or la publicité web étant ce qu’elle est, les revenus publicitaires seront probablement une goutte d’eau par rapport aux donations. “Compte tenu de ce qui s’est passé ces cinq dernières années pour des prévisions raisonnables et comparables à notre audience (ndrl : plus de 1 million de pages vues mensuelles), il ne s’agira pas d’un montant très important”.

En somme, rien de comparable avec le Huffington Post, tant en termes de revenus que de contenu. Les annonces ProPublica seront délivrées via le réseau Public Media Interactive Network, un réseau de publicités web opéré par National Public Media lancé en 2008 pour vendre les espaces publicitaires vacants sur NPR.org et PBS.org. Mais ce réseau s’est récemment étendu aux sites d’information non-lucratifs (dont Texas Tribune et MinnPost feraient d’ailleurs partie selon ce communiqué de presse). Ce réseau vend des packs : les éditeurs peuvent ainsi sélectionner ou non des packs de publicités à afficher sur leur site. “Nous avons regardé la liste des annonceurs et pour le moment, aucun d’entre eux ne nous a semblé problématique.” précise Tofel. Pas de “Perdez 3 kilos en 1 semaine” ou autres monstruosités… Et puis surtout, comme le dit Tofel : “Il est de notre ressort d’accepter ou non un annonceur qui nous est proposé”. ProPublica a d’ailleurs publié une charte d’acceptabilité des publicités qui stipule :

Tout d’abord, ProPublica se réserve le droit d’accepter ou de rejeter n’importe quelle publicité ou parrainage qui nous est proposé.

ProPublica refusera toute publicité qui est réputée ou supposée trompeuse, frauduleuse, illégale, ou qui omettrait de se conformer au normes de décence, de gout ou de dignité. Ces conditions demeurant à la discrétion seule de ProPublica.

ProPublica, comme tout éditeur de journalisme de qualité, maintient une séparation claire entre les informations publiées et le contenu publicitaire. Les publicités qui tenteraient de brouiller cette distinction seront rejetées.

Voilà une approche qui permet à la fois de prendre le meilleur tout en évitant le pire. Tofel explique : “il s’agit de lâcher un peu de latitude sans risquer de tomber dans des situations inconfortables – ou pire, qui nuiraient à la confiance des lecteurs”

Cette relation avec les lecteurs – qui en définitive, considère l’audience de ProPublica non pas comme un collectif anonyme mais comme des individus dans le meilleur des sens : des amplificateurs de messages – restera constante chez ProPublica y compris avec cette stratégie publicitaire. Comme nous le verrons, promet Tofel, les partenariats existants avec d’autres médias (48 rien que la dernière année – ce qui est rare dans le milieu) continueront d’envoyer du trafic vers d’autres sites, partenaires ou autres.

Même si l’intégration de bannières publicitaires implique un intérêt à conserver et faire grossir le trafic vers ProPublica, Tofel rappelle : “nous ne sommes pas là pour faire de l’argent, nous sommes ici pour provoquer du changement, ce qui est toujours le cas aujourd’hui. Mais nous avons besoin d’argent pour maintenir le navire à flots, ceci non seulement pour aujourd’hui et demain, mais aussi et surtout pour un futur plus lointain.”

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Article initialement publié sur Nieman journalism Lab

>> photos flickr CC Propublica ; mammal ; Trey Ratcliff

Traduction : Stanislas Jourdan

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Comment créer un média à but non-lucratif? http://owni.fr/2010/10/14/comment-creer-un-media-a-but-non-lucratif/ http://owni.fr/2010/10/14/comment-creer-un-media-a-but-non-lucratif/#comments Thu, 14 Oct 2010 12:31:51 +0000 Jean Abbiateci http://owni.fr/?p=31555 Je signale simplement une très intéressante ressource mise en ligne par la Knight Foundation. Pour rappel, cette fondation américaine, très à la pointe dans la prospective sur l’avenir du journalisme, finance nombre de médias à but non lucratif (Propublica, San Diego Voice,  California Watch, Texas Tribune pour les plus connus).

Le dossier, très dense et sans blabla théorique, s’intitule : Comment créer un média non-lucratif?

C’est ici. Je partage sur Papier Brouillon mes notes de lecture qui pourront peut-être intéresser quelques personnes. Précision : ce sont des notes subjectives et surtout sélectives. Le dossier en lui-même est beaucoup plus étayé et il contient de nombreux liens en prolongement. Bref, une mine d’or.

1. Travaillez votre énoncé de mission

Il deviendra votre document de référence tout au long de votre projet. Celui-ci doit être toujours tourné vers le service que vous pouvez rendre au public. Il faut que cette mission ait un but d’utilité publique comme « accroître la participation civique » ou « chercher les solutions aux problèmes ».

2. Soyez transparents

La naissance d’un média à but non-lucratif fait cohabiter tout un tas d’acteurs différents, lecteurs et bailleurs de fond notamment. D’où la nécessité de mettre en place des mécanismes pour protéger la mission de votre projet et surtout pour répondre par avance aux possibles accusations qui peuvent « tuer » un projet éditorial. Quel argent acceptez-vous ou (ou pas) ? Que faites-vous si l’un des vos enquêtes porte sur l’un de vos donateurs ? Cette nécessité de transparence concerne aussi l’éthique, la collecte de fonds, la vérification des faits ou le sort des données recueillies.

3. Gagnez de l’argent

On croit souvent à tort que les organismes sans but lucratif et ceux qui les dirigent n’ont pas besoin de se concentrer sur la recherche d’argent. Erreur ! Comme toute entreprise normale, un média à but non-lucratif doit s’appuyer sur un business plan qui tient compte des ressources et des dépenses, et doit suivre une stratégie marketing au service d’une croissance à venir. La seule différence est que l’argent est réinvesti dans l’association et pas redistribué.

Votre business plan doit vous aider dans la recherche de subventions et de dons. Il vous sert aussi d’outil de transparence pour vos donateurs. Principaux dépenses d’un média non-lucratif : salaires (+ charges), loyer et fournitures, voyage, recours à des entrepreneurs extérieurs, équipement, marketing, coût de collecte de fond. Ressources : mécénat, dons des particuliers, subventions, vente, formation, événements, revente contenus, déclinaisons papier, consulting…

4. Créez de l’envie autour de votre projet

Commencez par rassembler tous vos mails pour lancer une alerte ou un bulletin électronique. . Ancrez votre projet dans les réseaux sociaux. Mettez en ligne une vidéo présentant le projet. Utilisez Twitter comme un moyen informel d’avertir vos lecteurs de l’avancée du projet. Soyez accessibles et dialoguez.

5. Soyez actif pour construire votre communauté

Le travail de création d’une communauté est une forme essentielle pour le bon développement de votre projet. C’est la meilleure façon de faire vous faire connaître sans argent. Listez les groupes, associations, acteurs, personnes que vous voulez atteindre et avec qui vous souhaitez travailler. Une fois fait, établissez un planning pour les rencontrer. Organiser des réunions avec des personnes clés de votre secteur pour leur expliquer ce que vous faites. Ils pourront peut-être vous offrir quelques portes. Faites la promo de votre projet, dans la presse, la blogosphère ou lors de conférences.

6. Collaborez

Collaborez avec d’autres sites, d’autres médias, d’autres communautés. Partagez et faites connaître l’information que vous produisez. Laissez d’autres médias enrichir (photo, infographie) vos histoires et vos enquêtes. Faites équipe avec d’autres journalistes. Travaillez à plusieurs. Faites de la promotion croisée.

Attention : il faut une relation gagnant-gagnant. Alors avant de vous lancer dans une collaboration, vous devez vous poser plusieurs questions : est-ce le meilleur partenaire pour mon entreprise? Comment puis-je établir une collaboration ? Quelle est la réputation de ce partenaire ? Que m’apporte-il (plus d’audience, ressources complémentaires, enrichissement). Toujours se baser sur son intitulé de mission. Et rappelez-vous que les organisations ne collaborent pas ensemble, ce sont les gens.

7. Soignez votre présence en ligne

N’hésitez pas à lancer très vite un site, même une seule page, où vous pourrez collecter les adresses email de ceux qui veulent avoir plus d’infos sur le développement du projet. Ensuite, privilégiez un site fiable techniquement qu’une usine à gaz. Cependant, ne croyez pas que les gens vont venir sur votre site simplement parce que votre contenu est bon. Allez chercher les internautes là où ils sont, notamment sur les réseaux sociaux (Facebook et dans une moindre mesure Twitter). Soignez votre présence sur ces réseaux. C’est la porte d’entrée de votre travail.

8. Mesurez votre impact

Fixez-vous des objectifs, définissez des critères concrets, quantifiables et réalisables pour mesurer votre avancée, et tenez-y vous. Par exemple : « je vais livrer X enquêtes dans l’année ». Mesurer votre audience, l’importance de votre communauté, l’audience de vos histoires qui rencontrent le plus de succès et qui montre l’impact de votre travail. Votre impact, c’est aussi le nombre de gens que vous aurez éventuellement formés ou le nombre de personnes présentes à vos conférences. Ces mesures de votre impact seront inclus dans vos rapports, auprès de bailleurs de fond et dans les demandes de subventions.

9. Soyez à l’écoute

Soyez à l’écoute des premiers retours de vos premiers lecteurs. Mon organisation est sur la bonne voie ? Quelles nouvelles opportunités devrions envisager ? Nous sommes-nous éloigné de notre mission à cause de la pression des donateurs ?

10. Lancez-vous

Après tout votre planification, vous êtes enfin prêt à faire le grand saut. Prenez une grande respiration. Et sautez le pas.

>> Article initialement publié sur Papier Brouillon

>> Photo CC FLlickr : Purdman1, ShironekoEuro[slow]

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Ouvrez vos données, devenez une organisation-plateforme http://owni.fr/2010/08/11/ouvrez-vos-donnees-devenez-une-organisation-plateforme/ http://owni.fr/2010/08/11/ouvrez-vos-donnees-devenez-une-organisation-plateforme/#comments Wed, 11 Aug 2010 16:28:42 +0000 Tanja Aitamurto http://owni.fr/?p=23994 Les organisations à but non-lucratif [NdT: "non-profit" en anglais] font face à des défis similaires aux autres organisations : les vieilles structures ne fonctionnent pas à notre époque,  et les nouvelles restent encore à trouver.

Traditionnellement, les organisations à but non-lucratif sont des structures fermées qui fonctionnent comme intermédiaire entre les donateurs et les bénéficiaires. Les organisations allouent les fonds aux projets qu’ils ont décidées de doter, et les donateurs soutiennent les organisations, plutôt qu’un projet spécifique. Les bénéficiaires et les donateurs sont aux extrémités opposées de la chaîne – il existe à peine un contact entre eux.

Contact direct et soutien à des projets particuliers

Le rôle des organisations à but non-lucratif comme intermédiaire est en train de changer. Les donateurs peuvent à présent  soutenir un projet en particulier plutôt qu’une organisation dans son ensemble. Aujourd’hui, les donateurs peuvent aussi avoir un contact direct avec les bénéficiaires. Par exemple, sur la plateforme de micro-prêts Kiva.org, un donateur peut directement prêter de l’argent à tel entrepreneur, et sur des services de crowdfunding comme Spot.Us et KickStarter, un donateur peut soutenir exactement le type de journalisme ou le projet qu’il apprécie.

La foule peut s’organiser elle-même autour d’objectifs, de campagnes et de projets sans les structures que les organisations  fournissent traditionnellement. Les gens n’ont pas besoin d’un intermédiaire, tout non-lucratif qu’il soit,  pour provoquer l’impact qu’ils souhaitent voir advenir.

Ce changement pose un défi pour les organisations non-profit traditionnelles: comment peuvent-elles le tourner à leur avantage ?

La réponse consiste à devenir des plates-formes ouvertes qui facilitent la collaboration dans des espaces ouverts et réduisent radicalement la distance entre le donateur et le bénéficiaire.

Cela commence par l’ouverture des procédés d’attribution des dons – laisser par exemple les donateurs avoir leur mot à dire sur la destination des dons et les projets qu’ils soutiennent.

Richesse des données à partager

Autre piste: libérer leurs données pour que tout le monde s’en serve. Les organisations à but non-lucratif ont beaucoup de données intéressantes et rares issues de recherche. Les données pourraient être utilisées de différentes façons dans des buts différents, que ce soit dans la recherche académique ou le développement d’applications pour iPhone.

Connaissez-vous le cas réussi d’une organisation non profit traditionnelle qui a redéfini son rôle et sa structure ? Et sur l’ouverture des données ? Est-ce que quelque part dans le monde une structure à but non-lucratif a ouvert des données ?

Si vous avez des réponses, n’hésitez pas à me contacter:  tanja.aitamurto at gmail.com

Billet initialement publié sur le blog de Tanja, hébergé par le Huffington Post

Illustrations CC FlickR Mr. Kris,

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Spot.Us: les journalistes travaillent en public pour le public http://owni.fr/2010/07/06/spot-us-les-journalistes-travaillent-en-public-pour-le-public/ http://owni.fr/2010/07/06/spot-us-les-journalistes-travaillent-en-public-pour-le-public/#comments Tue, 06 Jul 2010 13:30:38 +0000 Tanja Aitamurto http://owni.fr/?p=21278

Dans mon précédent billet, j’ai présenté les découvertes les plus significatives de ma récente étude de cas portant sur Spot.Us, une plate-forme de crowdfunding pour le journalisme. J’y ai examiné ce que mes découvertes signifiait pour le journalisme et pour le rôle et le travail du journaliste.

Renégociation du rôle du journaliste

Un processus journalistique financé par le public apporte un nouvel élément au travail d’un journaliste : exposer, pitcher son projet en public. Traditionnellement, un journaliste pitche son sujet directement à un rédacteur en chef. Le journaliste n’a donc pas besoin de réfléchir à la promotion de son sujet aux lecteurs.

Dans un modèle crowdfundé, un journaliste doit être prêt à susciter l’attention sur son pitch afin d’attirer des donateurs. Cela signifie qu’ils doivent s’occuper de la promotion de leur pitch en convaincant la communauté de l’importance de son sujet.

Cependant, les journalistes de Spot.us ne sont pas très à l’aise pour pitcher leurs sujets en public et demander des dons. Cette nouvelle activité entraîne de nouvelles obligations et change la nature du rôle du journaliste.

Des changements similaires ont lieu dans l’industrie créative, les marques et les institutions comme les labels de disques et les institutions médiatiques perdant du pouvoir. Selon Mark Deuze, professeur associé au Département de Télécommunication à l’Université d’Indiana, la créativité et le commerce sont de plus en plus associés dans le travail culturel.

Ce développement suppose que les travailleurs créatifs conçoivent leurs compétences, leurs idées et leurs talent en termes commerciaux. Traditionnellement, les journalistes ont intégré l’autonomie créative et la critique de leurs pairs plutôt que l’intérêt du marché.

Ces nouvelles obligations défient la perception traditionnelle que le journaliste a de lui-même comme celle d’un créatif indépendant dont les histoires sont d’abord et surtout acceptées par les collègues plutôt que par le public.

La culture de la participation motive les journalistes

Sur Spot.us, une culture de la participation se manifeste déjà de plusieurs façons : les membres de la communauté (lecteurs et donateurs) peuvent donner de l’argent ou une idée pour un pitch, ils peuvent laisser un commentaire, soumettre un tuyau, ou s’acquitter d’une tâche qu’un journaliste a assigné aux lecteurs.

Ces options pour la participation, en particulier les dons de lecteurs pour un sujet, ont un impact fort et positif sur les motivations du journaliste. Un des journalistes que j’ai interviewé m’a expliqué que c’était “plus que motivant professionnellement” de voir que le public est prêt à soutenir son travail en donnant de l’argent.

Du point de vue du journaliste, le don crée un lien fort entre le journaliste et le donateur. Les journalistes trouvent cela gratifiant d’avoir un lien direct avec les lecteurs. Cette connexion crée aussi un fort sens de la responsabilité sur le sujet.

Cependant, c’est typique, les donateurs préfèrent participer seulement en faisant des dons. Ils ne sont pas désireux de laisser des commentaires ou de soumettre des conseils, ni ne s’engagent dans le processus au point de suivre de très près toutes les mises à jour du reportage. La plupart des donateurs ont le sentiment qu’ils ont fait leur part du travail en offrant de l’argent.

Spot.us : un laboratoire R&D personnel pour le journaliste

Pour les journalistes de Spot.us, cette plate-forme est plus qu’une façon de financer leur travail. Ils le voient comme une opportunité d’expérimenter de nouvelles méthodes journalistiques, par exemple l’engagement du lecteur.

Les journalistes voient aussi Spot.us comme une opportunité d’expérimenter des outils tels que la vidéo et l’infographie. Le site leur donne la liberté d’expérimenter à laquelle ils semblent aspirer. Ils ont l’impression qu’il y a un manque d’opportunité pour essayer de nouvelles choses quand ils travaillent dans un cadre plus traditionnel.

Les journalistes considèrent aussi Spot.us comme un bon moyen de trouver des partenaires en vue d’une collaboration.

Faire des dons pour une société meilleure

Les donateurs semblent moins contribuer pour un article en particulier que pour le bien commun. Ils suivent rarement les sujets qu’ils ont aidés à financer, et ils ne consultent parfois même pas l’article une fois fini.

Pour eux, ce n’est pas le sujet : ils veulent que leur don soit un catalyseur pour un changement dans la société. Ils espèrent que leur article aidera à ce que cela s’accomplisse.

Cette notion soulève une question sur le rôle du journaliste dans la société. Est-ce le rôle du seul journaliste d’informer les gens sur les débats et les problèmes ? Ou est-ce que le journalisme devrait aussi donner au public une chance de changer les choses, d’essayer de résoudre le problème ? Si la dernière hypothèse est valide, alors le journalisme de plaidoyer, guidé par des causes, ou qui vise à résoudre des problèmes a plus de sens pour la communauté que le journalisme neutre, objectif, qui fournit de l’information mais pas les moyens de résoudre les problèmes.

Un exemple de journalisme qui résout des problèmes, la rubrique Impact du Huffington Post, qui marrie le journalisme à des causes. Les articles d’Impact portent sur des sujets comme la faim dans les écoles, ou la misère d’une famille qui a perdu sa maison dans une inondation. À la fin de l’histoire, le lecteur a l’opportunité de donner à une organisation non-profit qui peut aider à réduire le problème.

D’après mes conclusions, certaines personnes, du moins, considèrent le journalisme comme un moyen de contribuer au changement social. Par conséquent, les organisations de journalisme devraient intégrer des outils tels que SeeClickFix ou le nouveau gagnant du Knight News Challenge CitySeed, qui permet au public de contribuer à l’amélioration de la communauté en un clic. Les lecteurs veulent des façons constructives de participer, et le journalisme devrait leur donner les outils pour cela.

Le journalisme aligné sur le cause marketing

Comme le public donne pour une cause, et pas nécessairement pour le journalisme, les pitches sur les plates-formes de journalisme crowdfundé comme Spot.us devraient se conformer aux caractéristiques du cause marketing, un terme appliqué au travail de marketing effectué dans une optique non-profit et dans le but d’un changement social.

En ces temps de déclin des conglomérats de médias, les organisations de journalistes devraient tenir un discours clair aux lecteurs sur les raisons pour lesquelles leurs sujets sont importants, et la façon dont un lecteur peut changer les choses dans la société. Il est important de noter, cependant, que la stratégie du cause marketing marche seulement pour certains types de sujets et de journalisme, comme le reportage d’investigation.

La participation comme outil pour construire son identité

Dans le journalisme crowfundé, les gens partagent plus qu’une simple histoire, ils partagent l’histoire de leur participation au procédé sur Twitter et Facebook. La participation lient les gens entre eux. Comme un donateur l’a exprimé : “J’ai eu le sentiment d’appartenir à une communauté quand j’ai donné.”

Quand les donateurs de Spot.Us parlent de leur don, ils construisent aussi leur identité. Le geste en dit sur eux, et ils veulent le partager. C’est un résultat et un bénéfice important pour le donateur. Les journalistes devraient donc réfléchir sur la façon dont ils pourraient fournir au public des moyens d’associer leur identité et les causes au reportage.

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Pour plus d’informations sur l’étude, contactez-moi à tanja.aitamurto at gmail.com ou sur Twitter @tanjaaita

Tanja Aitamurto est journaliste et effectue une thèse sur l’intelligence collective dans le journalisme. Elle a étudié l’innovation dans le journalisme à Stanford, et est diplômée en journalisme, sciences sociales et linguistique. Tanja conseille des compagnies de médias et des organisations non-profit sur les changements dans le domaine de la communication. Comme journaliste, elle est spécialisée dans le business et la technologie. Elle contribue principalement au HuffPo et au Helsingin Sanomat, le quotidien de référence en Finlande, ainsi qu’à la Finnish Broadcasting Company. Tanja partage son temps entre San Francisco et la Finlande, son pays d’origine.

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Voir la première partie du billet ici.

Billet initialement publié sur Mediashift sous le titre “Spot.Us Lessons: Journalists Work in, and For, the Public” ; traduction Sabine Blanc

Image CC Flickr alexkess.

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http://owni.fr/2010/07/06/spot-us-les-journalistes-travaillent-en-public-pour-le-public/feed/ 4
14 pistes et idées pour financer le non-profit http://owni.fr/2010/06/17/14-pistes-et-idees-pour-financer-le-non-profit/ http://owni.fr/2010/06/17/14-pistes-et-idees-pour-financer-le-non-profit/#comments Thu, 17 Jun 2010 15:22:18 +0000 Jean Abbiateci http://owni.fr/?p=19190 Petite check-list sur les sources de financement possibles d’un média (basé sur l’hypothèse d’un modeste média en ligne non-profit). Cette liste non exhaustive est bien sûr ouverte à toute les idées lumineuses et à toutes les critiques féroces.

1. Traquer des subventions publiques

Grand classique pour une association (quelles sont les aides existantes ?) et pour les médias. Il y a sans doute de l’argent à prendre également sur des subventions dont la raison d’être n’est pas liée directement au journalisme : innovation numérique, projet culturel et social… Sans compter les aides indirectes (pour la création d’emplois notamment).

2. Creuser du côté du mécenat d’entreprises.

Sans doute là où l’on trouverait pas mal d’argent, en faisant notamment la tournée des fondations d’entreprises (c’est le modèle de la plupart des médias non-profit US). Mais ça demande un savoir-faire dans le fundraising “la recherche de fonds” qui n’est pas forcément évident. Et cela nécessite de proposer un projet « vendeur » (excellence, innovation…).

3. Placer de la publicité en ligne

Au prix du CPM (coût pour mille), rien de très glamour comme perspective. Même chose du côté de l’affiliation.

4. Faire sponsoriser des sujets d’enquêtes

Sans doute une piste d’avenir, même si pour l’instant, je n’ai rien vu de concret. On pourrait imaginer par exemple que qu’une mutuelle finance une enquête sur la santé au travail. Même chose pour les ONG. Après, ça pose quelques problèmes déontologiques (mais pas plus que d’autres).

Des informations intéressantes sur ce blog

5. Faire appel aux dons des internautes

Ce n’est sans doute pas la partie ni la plus “lucrative”, ni la plus facile à gérer. Mais c’est la plus intéressante à mon avis. C’est une bonne jauge de l’intérêt d’un projet au sein d’une communauté de lecteurs-internautes. L’initiative du “mur” de Rue89 est sympa. Autre idée beaucoup plus intéressante : du sponsoring sur un sujet d’enquête spécifique, comme le fait Spot.us.

6. Revendre du contenu écrit

Intéressant, notamment en terme d’images. Cela nécessite que le média arrive à avoir une notoriété, une griffe dans son domaine d’expertise, et fonctionne comme une petite agence. Assez facile à faire quand même (cf. expérience de pigiste), mais peu rémunérateur.

Perso, j’aime bien l’idée de Good Magazine qui distribue gratuitement ses infographies via le réseau Starbucks.

7. Décliner ses sujets sur des supports à valeur ajoutée (documentaire TV, multimédia…)

C’est sans doute aussi un moyen de rentabiliser un travail d’investigation et des contacts, plutôt que de se le faire piquer ensuite par des sociétés de production TV. C’est aussi le moyen d’aller taper des bourses styles CNC et Scam… Mais ça demande du savoir-faire et du réseau.

8. Faire de la formation

Il me semble assez facile de capitaliser sur une expérience, un bagage de journaliste pour faire de la formation. Chronophage mais assez facile (il me semble) comme rentrée d’argent complémentaire

10. Adosser au site un magazine papier payant

Classique mais rien de mieux pour fixer sur papier le travail du web (du « reverse publishing » pour les spécialistes) Elle correspond à mon avis à une réelle attente d’une certaine frange de lecteurs (et pas forcément des technophobes). Les investissements sont importants (distribution, maquette…) mais pas forcément insurmontable pour une périodicité de type bimestriel.

11. Editer des livres

Cela demande là aussi des investissements et surtout un savoir-faire important (mais il est toujours possible de trouver un partenariat avec un éditeur), mais c’est à mon avis une excellente piste pour décliner des enquêtes ou reportages au long cours ou des produits web plus spécifiques (un photoblog par exemple deviendrait un bouquin de photos + fourni).

12. Vendre des goodies

Genre tee-shirt et mugs… Mouaih, bof bof…

13. Vendre des photos en ligne

Vendre des photos en ligne, comme pourrait le faire une galerie. L’exemple de Média’vu n’est pas très convaincant… Pas trop creusé la question.

14. Vendre du service

Style petites annonces… Demande une énorme logistique.

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Billet initialement publié sur le Bloc-Notes de Jean Abbiateci.

La soucoupe expérimente quelques-unes de ces solutions. Retrouvez-en certaines ici.

Crédits Photo CC Flickr : -lif-, sgw.

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Une réponse parmi d’autres, trop rares, à la crise des médias ? http://owni.fr/2010/04/23/owni-une-reponse-parmi-d%e2%80%99autres-trop-rares-a-la-crise-des-medias/ http://owni.fr/2010/04/23/owni-une-reponse-parmi-d%e2%80%99autres-trop-rares-a-la-crise-des-medias/#comments Fri, 23 Apr 2010 10:23:51 +0000 Nicolas Voisin http://owni.fr/?p=13065 Le plan de vol de la soucoupe

Alors que le moindre battement d’ailes d’un papillon dans les médias américains induit une réaction quasi immédiate  en France comme ailleurs dans le monde, la compénétration entre sphères publiques européennes reste quasi nulle.

OWNI vise à se faire l’écho du meilleur des informations et des idées sur l’ère numérique en provenance de nos voisins européens. Pour ce faire, dans un premier temps, un réseau de vigies européennes sera constitué. A l’horizon 2011, une version anglaise d’OWNI sera lancée , parallèlement à un déploiement européen et international d’OWNI ; ceci notamment à l’aide de partenariats d’ampleur transfrontalière (cf. interview d’Adriano Farano).

Laboratoire du journalisme innovant, OWNI se doit d’être à la pointe de l’expérimentation en matière de datajournalism, une nouvelle façon de présenter l’information à l’aide de visualisations, d’infographies dynamiques, de journalisme de base de données et d’outils interactifs.

Fort de ses équipes, OWNI a déjà fait montre de ses capacités en matière de datajournalism: une carte de la vidéosurveillance dans le cadre des Etats Généraux de la Sécurité à l’école ou encore un outil de géolocalisation des bureaux de vote à l’occasion des Régionales 2010.

En préparation : visualisation des données sur les établissements carcéraux, carte des flux migratoires en Europe, visualisations autour du parc éolien français ou du G20, ou encore représentation graphique et interrogeable de la place des médias classiques dans le web social.

Dans le même sillage, OWNI vise également à expérimenter des nouvelles formes de journalisme, en particulier avec le “journalisme de liens”. Lancé aux États-Unis avec des “success stories” telles que The Drudge Report, le “linkjournalism” consiste en une sélection de liens pertinents sélectionnés avec soin pour un public donné.

Dans les projets d’OWNI figure notamment le lancement d’une LinkTV, une web TV basée sur des liens de vidéos de qualité hébergées entre autres sur YouTube ou Dailymotion. Ceci fait suite aux expérimentations menées depuis deux an notamment avec Aaaliens (agrégateur de liens fédérant certains des veilleurs les plus réputés du web social francophone).

Pour porter son projet éditorial, OWNI se constitue en pôle non-profit, composé d’une association, OWNIeditors, et d’un fonds de dotation, OWNIpedia, qui financera d’autres projets innovants dans l’écosystème de l’information.

Les valeurs intrinsèques d’OWNI s’inscrivent dans l’un des principes fondamentaux de la démocratie française: l’accès des citoyens à la culture et au savoir comme véritable extension du droit social. Cette notion d’intérêt général a été fondée par le Conseil National de la Résistance selon lequel, pour pouvoir participer pleinement à la démocratie et faire des choix réfléchis et informés, les citoyens doivent acquérir un minimum d’éducation et de savoir.

Valeurs et outils, deux notions inextricables

Né en avril 2009 en France lors de la bataille contre la loi Hadopi, OWNI est engagé pour les libertés numériques et vise à faciliter un débat public constructif, critique et technophile. Fort d’un réseau de 500 contributeurs, auteurs, professionnels, chercheurs, journalistes, entrepreneurs et d’internautes actifs, l’objectif d’OWNI – média, réseau social et plateforme de publication – est d’offrir le meilleur de l’information et du débat sur l’évolution de la société numérique en France et en Europe.

OWNI raconte et analyse l’impact d’Internet sur la société, les pouvoirs et les cultures. La publication met en scène au quotidien ses contenus à la destination gracieuse du plus grand nombre, et grâce à la bonne volonté de notre communauté d’auteurs. Celle-ci accepte de publier ses articles sous licence Creative Commons, permettant ainsi aux idées de circuler le plus possible.

Ces valeurs, nous tentons au quotidien de les défendre en permettant à chaque internaute, d’obtenir une information claire, identifiée et gratuite pour comprendre la mutation du monde qui nous entoure.

OWNI est développé en open source (en logiciel libre) dans l’environnement Wordpress (WorpressMu + BuddyPress), “Content Managing System” qui est la première plateforme de publication dans le monde. Ceci est un choix stratégique fondamental qui participe de la philosophie de notre média, en adéquation directe avec les valeurs de l’Internet que nous défendons (partage, collaboration, transparence, ouverture), mais c’est également un avantage en termes de recherche et développement collaboratifs considérable.

Enfin, et c’est un point clef, l’environnement de travail, le code, les services, les applications tierces, sont en permanence mis à jour et testés par des millions d’utilisateurs dans le monde. La communauté de développeurs Wordpress est très dense, très active (bien plus que toute autre communauté autour d’une plateforme de publication en logiciel libre comme Drupal). Automatic, société qui pilote et exploite le code de Wordpress (à l’adresse wordpress.com et en fournissant des solutions professionnelles dédiées) fait évoluer de façon organisée et pérenne l’écosystème de bénévoles, d’entrepreneurs du web et de passionnés qui gravitent autour de sa solution, sans échange marchand systématique entre ses membres (cf. l’adresse wordpress.org).

Les repères économiques usuels s’effondrent

Dans un monde en perpétuel changement, en crise globale et identitaire, les repères économiques usuels s’effondrent.

Les acteurs économiques doivent repenser leurs modèles, en se transformant. L’alliance entre le profit et le non-profit répond aujourd’hui à cette problématique. Le commerce équitable en est la preuve flagrante. Avec 2 300 milliards d’euros de chiffre d’affaires net global en 2007, 79 000 points de ventes dont 55 000 supermarchés, et une croissance annuelle de 20%, le commerce équitable est le marché qui connaît la croissance la plus rapide du monde. Ce succès est du à l’association du secteur économique (fabricants et distributeurs) avec le secteur non lucratif (associations, fondations), qui répondent tous deux au besoin essentiel des clients d’aujourd’hui : vivre dans un monde meilleur. Ainsi, les entreprises conservent leurs marges et leurs rentabilités tout en aidant 1,5 million de paysans dans le monde.

Dans le secteur des médias, l’hyper abondance de l’information, et notamment numérique, a provoqué un effondrement des recettes publicitaires perçues par chacun des acteurs. Cette situation entraîne la nécessité de repenser le rôle de médiateur culturel.

C’est ce qu’à fait le milliardaire américain Herbet M. Sandler avec le média web ProPublica qu’il a doté d’un budget annuel de 10 millions de  dollars. Pilotée par l’ancien directeur de la rédaction du Wall Street Journal, la rédaction produit des sujets d’investigation qui sont diffusés soit en partenariat avec d’autres médias (dont le New York Times), soit directement sur son site web. Leur production est financée par le non-profit via des mécènes qui donnent en moyenne 66 000 euros. Ainsi, la rentabilité du média est assurée tout en délivrant une information claire et objective au plus grand nombre.

Ce modèle profit/non-profit vient d’être récompensé en avril 2010 par un Prix Pulitzer remis à une enquête publiée sur ProPublica.

L’attrait profit/non-profit permet en outre de créer des synergies fiscales grâce, en particulier, aux mécaniques de donations. Lancée en 2007 par Jean-François Daniel (disclaimer: Jean-François Daniel fut un partenaire actif d’OWNI) l’opération “La Rose Marie Claire” en France est un exemple concret de ce type de synergie. En vendant une rose dont la moitié du prix de vente est reversée à des associations qui scolarisent les jeunes filles défavorisées, les entreprises bénéficient d’une réduction fiscale de leur impôt sociétés sur la partie du prix qui est reversée et augmentent leur chiffre d’affaires grâce au trafic supplémentaire généré par l’attrait du non-profit (augmentation de 20% du trafic dans les points de vente), sans compter l’image qu’elles donnent ainsi à leurs clients.

Dans le cas d’OWNI, la synergie profit/non-profit se traduit [maj : aurait pu se traduire] par la création de l’association OWNIeditors qui prendra dorénavant en charge le développement éditorial du média social OWNI, jusqu’ici piloté par 22mars. Ceci se fait en restant dans le même écosystème et avec une totale continuité – 22mars est fondateur d’OWNIeditors et a associé à son capital l’ensemble de l’équipe éditoriale (Guillaume Ledit, Sabine Blanc, Adriano Farano, Nicolas Kayser Bril) en plus des développeurs (Tom Wersinger, Aurélien Fache) et de notre maître es-design, Loguy aka Logule. Cette prise en charge est permise dans un premier temps par l’octroi d’un prêt à taux zéro de 250 000 euros à l’association, puis par le développement des recettes non-profit : dons, mécénat et subventions.

Ce dispositif permettra l’essor du projet éditorial d’OWNI. La nouvelle version du site en est l’une des incarnations. En beta permanente, la soucoupe est un phalanstère, un lieu d’expérimentation afin de permettre une information qui serve l’intérêt général et permette une meilleur compréhension des cultures liées à l’essor de ce nouveau corps social qu’est le web, devenu véritablement “social”.

Notre stratégie – et les mois, voir les années, de travail que cela a nécessité – est une réponse parmi d’autres, trop rares, à la crise des médias. Cet écosystème est celui d’une économie qui précède puis que permet une stratégie médiatique d’intérêt public, menée par des artisans. Ces artisans en lien social sont la “dream team” que le temps et l’exigence nous ont permis de réunir.

Un éditeur ne saurait avoir d’autre chemin que celui de “prendre soin”. Et de sublimer.

Ils nous ont également aidé sur ce chemin : Pierre Bilger, Eric Scherer, Pierre Bellanger, Jacques Rosselin, Jean-Christophe Feraud, Jean-Marc Manhack, Olivier Missir, Sébastien Ravut, Remi Vincent, Pierre Romera, Isabelle Mirri (…)

Voir aussi The Flying Saucer’s Flight Plan, en anglais.

MAJ : Dissocier l’actif et les équipes ? Nous n’avons pas retenu cette hypothèse. Par contre le modèle mixte “profit / non-profit” est au coeur de l’économie d’OWNI. Suivez les Editos mensuels, ils content notre histoire ;-)

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Adriano Farano: L’innovation passe par la coopétition http://owni.fr/2010/04/23/adriano-farano-innovation-coopetition/ http://owni.fr/2010/04/23/adriano-farano-innovation-coopetition/#comments Fri, 23 Apr 2010 10:16:44 +0000 Admin http://owni.fr/?p=13044

Il n'est plus aussi jeune, mais il n'a jamais été aussi beau. Photo de Donato Di Bello

OWNI : Pendant neuf ans vous avez piloté une association, Café Babel, qui est devenue un véritable média européen sur le Net, entièrement traduit en six langues.

Comment finance-t-on un média au sein d’une association à but non lucratif ? Est-ce que le non-profit peut garantir des résultats à la hauteur ?

Café Babel est aujourd’hui l’un des plus anciens médias pure player d’Europe. Il a été également le premier site web d’information à être admis à la Fédération Nationale de la presse spécialisée et a été élu « média de l’année 2008 » aux European Agenda Awards en s’imposant, grâce à son originalité, face au Financial Times ou à Libération.

Tous ces résultats ont été obtenus sur un modèle associatif. Mais attention: qui dit non-profit ne dit pas uniquement bénévolat. En 2009 Café Babel a compté une équipe de 14 salariés temps plein.

Grâce au pouvoir attractif des projets menés (reportages itinérants en Europe, premiers blogs multilingues, site dédié au débat transnational lors des élections européennes…), Café Babel a pu attirer des sponsors aussi variés que la Commission européenne, la Région Ile-de-France ou encore des bailleurs de fonds privés tels qua la Fondation Hippocrène ou la Knight Foundation ou encore des marques à l’image des assurances April.

Depuis quatre mois vous travaillez au développement d’OWNI. Quel a été le contexte de cette implication et quelles sont les éléments-clés qui en ressortent ?

Après avoir animé Café Babel pendant neuf ans, j’ai décidé de tourner la page pour relever de nouveaux défis. Je me suis alors naturellement tourné vers cette bande de geeks mais aussi designers, journalistes, blogueurs, entrepreneurs et universitaires qui jaillit autour de Nicolas Voisin. C’est un environnement métis, hybride mais pas pour autant moins exigeant que celui des médias traditionnels pour lesquels j’ai eu l’occasion de travailler. C’est passionnant.

Aujourd’hui, j’évolue en tant que consultant indépendant et OWNI est mon principal client. Pour la « soucoupe », je collabore à la stratégie éditoriale (voir la charte censée cadrer le journalisme en réseau d’OWNI), au développement européen et à une levée de fonds qui vise à mettre en œuvre un modèle économique durable, fondé sur une mixité for-profit/non-profit.

Vous venez d’obtenir la bourse “Knight fellowship for professional journalists” de l’université de Standford en Californie, que vous rejoignez en août pour 10 mois. Quel sera le sujet de votre recherche ?

Seul Européen dans un groupe d’une vingtaine de journalistes et entrepreneurs des médias, je serai confronté à trois types de challenges : suivre les cours de mon choix sur tout le campus de Stanford ; participer à des réunions et des conférences sur le futur du journalisme avec des leaders d’opinion de la Silicon Valley ; puis travailler sur celui qui est pour moi l’enjeu de la presse aujourd’hui : stimuler l’émergence de la prochaine génération d’entrepreneurs de l’information en Europe. Je compte sur la collaboration de tous ainsi que sur le principe de serendipité pour tirer parti de cette expérience…

Creative Commons, Logiciel libre, modèle mixte profit/non profit, coopétition, y-a-t-il ici une réponse solide à la crise des médias et en particulier à celle de la presse ?

Il y a, chez OWNI, cet embryon d’écosystème des médias que nous devons construire si nous voulons allier innovation, durabilité et respect des principes qui fondent le journalisme. L’environnement métis de la soucoupe nous a permis d’accoucher d’un modèle éditorial, économique et fiscal extrêmement attractif pour les investisseurs et garantissant une grande indépendance à OWNI. Je suis convaincu que ce modèle à trois étages (société de services, fonds de dotation, association éditrice d’OWNI) est transposable.

Les solutions à la crise de la presse viendront de la créativité, pas du conservatisme.

Quelle est la position de la France dans cet écosystème de l’innovation médiatique ?

Justement, il y a en France une certaine schizophrénie. D’un côté, c’est indiscutablement le pays européen avec l’environnement médiatique « pure player » le plus actif et riche (Rue89, Mediapart, Arrêt sur Images, Slate etc.). De l’autre, trop souvent la presse française s’enfonce dans un esprit de clocher, très conservateur, dont le syndrome le plus préoccupant est la Google-phobie. J’ai rencontré des patrons de presse dont la seule préoccupation était de blâmer le moteur de recherche. Et si, au lieu de perdre leur temps à lutter contre les moulins à vent, ils investissaient dans l’innovation ?

Quel est, selon vous, l’enjeu majeur à l’échelle européenne dans le secteur des médias ?

Le décloisonnement, sans doute. Un décloisonnement qui dépasse les clivages à caractère sectoriel et transnational.

D’un côté nous devons permettre aux journalistes et aux patrons de presse de sortir de leur tour d’ivoire en se confrontant, quotidiennement, avec les développeurs et créatifs en tous genres mais aussi avec les financeurs et les entrepreneurs. Pour cela, il faut des lieux de brassage, des incubateurs, mais surtout un changement radical : de la culture de la concurrence molle à celle de la « coopétition ». Je vais en Californie aussi pour m’imprégner de tout cela.

De l’autre, nous devons dépasser les barrières nationales. Chaque pays européen pris tout seul est trop petit pour émerger comme leader de l’innovation médiatique. Il faut favoriser les projets transnationaux, qui peuvent devenir une véritable usine à créativité.

Pour cela, je rêve d’un programme Erasmus pour tous qui, appliqué aux médias, pourrait financer des périodes d’étude ou travail à l’étranger. Dans le voyage et l’expatriation, il y a quelque chose de paradoxal : ce n’est que lorsque vous perdez vos repères que vous pouvez enfin devenir vous même. Le terrain devient alors très fécond pour innover.

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ProPublica remporte un Pulitzer: la fin de l’hypocrisie d’une information “for profit”? http://owni.fr/2010/04/13/propublica-remporte-un-pulitzer-la-fin-de-lhypocrisie-dune-linformation-for-profit/ http://owni.fr/2010/04/13/propublica-remporte-un-pulitzer-la-fin-de-lhypocrisie-dune-linformation-for-profit/#comments Tue, 13 Apr 2010 12:23:51 +0000 Nicolas Kayser-Bril http://owni.fr/?p=12174

En récompensant une enquête financée par l’organisation new-yorkaise sans but lucratif, le jury du plus prestigieux prix de journalisme invite le secteur à repenser son business model, en particulier s’agissant d’investigation. La logique de rentabilité, surtout en cette période de crise, a des limites.

ProPublica, l’organisation new-yorkaise sans but lucratif pilotée par l’ancien du WSJ Paul Steiger, remporte un prix Pulitzer ! Les forçats de l’info se sont fait une joie de copier/coller l’information toute la journée d’hier. Les 968 articles sur le sujet le répètent à l’envie : pour la première fois, un article écrit pour le web remporte le glorieux prix (voir chez LCI et France Info pour des exemples). Seul Pierre Haski relève le niveau sur Rue89.

En réalité, ce Pulitzer n’est pas la première récompense reçue par un site web.

Le jury avait déjà trempé ses orteils dans le bain de l’info en ligne. Bien qu’étant composé à 95% de gros bonnets du journalisme traditionnel (le rédac chef de Politico est l’exception), ils avaient déjà salué la couverture en ligne du Times-Picayunes lors de l’ouragan Katrina en 2005. L’année dernière, ils ont également récompensé le Saint-Petersburg Times pour PolitiFact, une application qui détermine le degré de vérité des déclarations des politiques.

Photo Andres Rueda/Flickr

Une reconnaissance pour les nouveaux modèles de l’info ?

Avec un Pulitzer 2010 à ProPublicac’est la première fois qu’un média explicitement “non-profit” monte au sommet du journalisme mondial. Le message qu’a voulu envoyer le jury cette année est sans équivoque : en période de crise des vieux modèles économiques, le journalisme d’investigation ne peut se baser seulement sur des logiques de profit et de recherche de l’audience à tout prix.

Les médias financés par des mécènes font désormais officiellement jeu égal avec les entreprises traditionnelles. Philippe Couve le rappelait la semaine dernière, l’information n’a jamais été un produit commercialement viable. Jacques Rosselin, fondateur de Courrier International, en rajoute une couche. Citant Alain Minc, il compare le journalisme à de la haute-couture, “activité non rentable financée par les parfums et produit dérivés”.

Dans leur expérience du for-profit, les médias ont déjà exploré plusieurs pistes, des services Minitel à l’organisation de conférences pour la presse professionnelle. Rosselin cite l’exemple de CityzenTV, une télé locale caennaise financée par les recettes du bar dans lequel elle était implantée. Sans que ça le choque pour autant : “Après tout, un bistro, un site local, une télé local ou un journal local jouent tous le même rôle de lien social non ?”

Les limites du non-profit

Eric Scherer, directeur de la stratégie de l’AFP, revient sur les limites du non-profit. Pour lui, la déconnexion entre publicité et journalisme survenue sur le web pousse les producteurs de contenus à chercher de nouvelles sources de revenus. Si le non-profit se développe aux US, avec Spot.usTexas TribuneMinnPost, entre autres, ça n’est pas la solution à tout. D’autant plus que la culture du mécénat n’existe pas en France.

Scherer met le doigt sur un autre problème du journalisme non-profit : le journalisme orienté. De plus en plus d’ONG se lancent dans l’investigation pour combler le manque de moyens de la presse traditionnelle (voir le dossier du Nieman Labs sur le sujet). Pas sûr cependant qu’elles n’apportent pas plus de problèmes qu’elles n’en résolvent. En effet, ProPublica et consorts restent les héritier d’une certaine tradition d’objectivité quand Greenpeace ou Amnesty International cherchent à faire passer un message.

Les systèmes hybrides, se finançant via des subventions ou des dons directs de leur audience, semblent plus prometteurs aux yeux de Scherer.

Non-profit mais pas sans le sou !

Toujours aux États-Unis, c’est la Fondation Knight qui est à la pointe du soutien au journalisme innovant, en particulier avec les Knight News Challenge, des prix annuels pour un montant de 5 millions de dollars dont les gagnants seront annoncés au mois de juin prochain.

Cette évolution ne laissait que peu de doutes sur le nom du vainqueur 2010, deviné fin mars par Editor&Publisher. Face à ce mouvement de fond vers le web et le non-profit, le prix de l’université de Columbia ne pouvait rester en marge. Dorénavant, l’Europe non plus ne pourra pas durablement ignorer ce glissement vers le non-profit…

ProPublica a été créé en 2007 par le milliardaire américain Herbert M. Sandler qui l’a dotée d’un budget annuel de 10 millions de dollars. Le budget courant est financé par des mécènes plus modestes. Les dons s’élèvent en moyenne à 66.000 euros par donateur, d’après les calculs d’Alan Mutter.

D’après les documents fiscaux de ProPublica, les journalistes sont payés un peu plus de 60 000 dollars par an. Un peu moins de 3 700 euros bruts par mois. Un salaire relativement correct en temps de crise du journalisme. Pas étonnant qu’ils soient en mesure de sortir plus de Pulitzer que leurs homologues de Seed, le programme de sauvetage du journalisme d’AOL. Là bas, les piges sont payées 50 dollars. et l’optique semble demeurer la vente de pixels publicitaires.

Dans la même veine, Owni, le média social que vous êtes en train de lire, s’achemine vers un développement explicitement non-profit (fonds de dotation européen, association des éditeurs…) que nous vous conterons dans les jours et les semaines à venir. D’ici-là, vous découvrirez également la nouvelle soucoupe /-)


A contribué : Adriano Farano.

Disclosure: Adriano était dans le jury des Knight News Challenge cette année

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